Tiers Payant Généralisé : l’objectif final

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Mais que cherchent donc les Pouvoirs Publics ? Oublions un instant les patients, les professionnels de santé, et les assureurs. Mettons-nous dans la peau de ce monstre froid qui s’appelle l’Etat. Et que les citoyens appellent la République.

 

 

 


La République est devenue soluble dans l’Etat

  • L’Etat est géré de fait par des permanents qui sont les véritables chevilles ouvrières de la permanence du pouvoir. Ce sont des fonctionnaires, heureusement inamovibles, qui entretiennent la mémoire du fonctionnement de la République.
  • Mais ces fonctionnaires sont aux ordres des élus issus du peuple. Ce sont les élus qui donnent les impulsions, les axes, et qui fournissent les orientations. Les élus, quel que soit leur valeur et leur notoriété, ne peuvent accéder au pouvoir qu’en faisant miroiter ce que le peuple espère. On appelle cela des promesses électorales. Lesquelles ne peuvent jamais être tenues car les politiques ont une vision idéologique et partisane qui est le plus souvent en rupture avec le monde réel, leur but étant essentiellement de se faire élire. D’où le décalage entre « l’état de grâce  » qui fait suite aux élections, et le désenchantement qui va en se raccourcissant au fur et à mesure que de scrutin en scrutin, les individus comprennent leurs désillusions.
  • L’Etat ne doit sa survie qu’au nom des réformes qu’il entreprend ou prétend entreprendre. Ces réformes sont soit « réactives » (un attentat-une réforme, un mort de plus sur les routes-une réforme, etc.), soit « réfléchies » (un rapport-une réforme), soit « programmées » (un plan sur plusieurs années destiné à modifier le fonctionnement en profondeur de la société).
  • Les réformes réactives ou réfléchies, sont des visions à court ou moyen terme. Certaines tombent juste ou du moins sont considérées comme justes (l’abolition de la peine de mort, le droit à l’avortement…) car elles tiennent dans la durée (20 ans, 30 ans, voire acquis définitif).  D’autres tombent à côté (les 35 heures, les nombreuses réformes sur l’Enseignement…), et ont un cycle relativement court (5 ans, rarement plus).  Ces cycles deviennent de plus en plus court car les individus comprennent à force que ce type de réforme ne change strictement rien à leur quotidien  : depuis 35 ans, chaque président fait de la lutte contre le chômaaaaaaage, sa priorité, avec le succès qu’on connait. Ce n’est pas de ces réformes là dont je veux parler.
  • Ce dont je veux parler, ce sont des réformes bien plus latentes et sournoises, celles que les élus se passent de législature en législature comme un bâton de relai, aidés en cela par la mémoire des permanents de l’Etat. Le cycle de ces réformes est très long (30, 50 ans). Ces réformes naissent d’une volonté politique forte, voire emblématique (De Gaulle, Mitterrand), d’évènements majeurs (guerres, révolutions, catastrophes, mutations technologiques), et d’une maturation sociétale lente.
  • Ces mouvements lents et inéluctables aboutissent à la désintégration de pans entiers de la société. Quelques exemples : le monde ouvrier qui avait acquis une force et une légitimité depuis la fin du XIXè siècle n’est plus qu’un tissu dilacéré par les plans sociaux et le broiement des rouleaux compresseurs économiques ; les instituteurs, autrefois puissance morale du village autour du curé, du médecin, du pharmacien et du notaire, ont perdu toute légitimité auprès des élèves, de leurs parents et des Rectorats divers ; les architectes, héritiers des bâtisseurs de cathédrales, des palais et des monuments qui nous enchantent ne sont plus -à part quelques stars du marché-  que des asservis aux DTU, aux règlementations et aux manigances foncières de quelques uns. J’arrête là. Il n’est pas un corps de métier, un expert, un artisan, une corporation qui ait échappé en un siècle à cette main-mise tentaculaire et hégémonique de l’Etat.

L’Etat, vague vestige de la « Res publica », est devenu une entité sourde, préoccupée de sa seule survie qui tient en des spasmes réguliers qu’on appelle les Elections. Ainsi le peuple a t-il l’impression de posséder un quelconque pouvoir sur les évènements, puisqu’il élit démocratiquement des individus issus de ses rangs, censés le représenter. Notre République s’est littéralement dissoute dans l’Etat.

Les médecins, prochaines victimes de l’Etat

Évidemment, le terme est provocateur. Comment cet Etat qui est censé nous protéger, nous gouverner, nous structurer pour un mieux être collectif et individuel peut-il être un ennemi pour tout un pan de la société ?

  • L’anecdote remonte aux années 60. Au beau milieu des vacances, la nièce du Général de Gaulle a mal au ventre. On demande donc au meilleur chirurgien de l’époque de venir donner son avis. Mais le chirurgien est en week-end. On le fait revenir au nom de la raison d’Etat, et le chirurgien diagnostique une appendicite à la jeune fille qu’il opére sur le champ. Mais il demande alors des honoraires à la hauteur du dérangement et de la … raison d’Etat. La légende veut que le Général, un peu excédé par cet excès d’honoraires ait estimé que la profession de médecin en prenait un peu trop à son aise. Cette étincelle a suffi pour déclencher une lente mais inexorable mise à pied du corps médical qui allait durer une cinquantaine d’années.
  • De fait, dans les années 70, auréolés de leurs succès médicaux, plébiscités par les patients, confortés dans leur position par les données de la science, les médecins, et avec eux tout les professionnels de santé, avaient le vent en poupe : Barnard, Hamburger, Cabrol…. Un terme est resté, le mandarinat médical, mélange de pouvoir médical exorbitant et pour certains d’honoraires en rapport. Plusieurs coups de canif sont venus entailler ce robuste tissu : le scandale du sang contaminé, l’affaire du distilbène, l’isoméride, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, les interrogations sur certains vaccins…
  • Et puis avec l’irruption d’internet dans les années 2000, c’est l’image même du médecin en tant que sachant qui s’est trouvée écornée, les patients ayant accès à l’information 1.0 et surtout 2.0.
  • Détrôné de son piédestal, le médecin est la prochaine victime désignée, non pas tant à cause de la chute de son image, que parce qu’il est le fusible entre la demande des patients et les contraintes économiques de l’Etat. Ce que l’Etat veut, ce sont des médecins aux ordres, pas chers, et corvéables, non salariés, mais en ayant les contraintes sans en avoir les avantages (congés maladie, indemnités journalières, chômage…). Une preuve de cette volonté de l’Etat, l’afflux massif de nos confrères étrangers que l’Etat français siphonne parce qu’il ne trouve plus de médecins français prêts à se soumettre à cette forme d’esclavagisme.
  • Les médecins salariés, hospitaliers notamment, sont depuis longtemps et sans en avoir pour certains pleinement conscience,  sous la coupe de l’Etat. Celui-ci utilise diverses courroies pour les inciter à soigner toujours mieux pour toujours moins de subventions : la DHOS, les ARS, la DGS, etc. Cet outil s’appelle la T2A (Tarification A l’Activité). Un hôpital est une entreprise qui doit équilibrer son budget et surtout justifier de ses actes pour bénéficier de l’enveloppe nécessaire à sa survie l’année suivante. Total, on fait toujours plus d’actes, d’imagerie médicale, d’examens biologiques, bien souvent inutiles, pour obtenir plus de subventions de l’Etat. Un directeur d’hôpital à qui je présentais une solution informatique pour optimiser la prise en charge des urgences, m’a dit avec un sourire bienveillant et une tape dans le dos que cette solution que je proposais était sans aucun doute parfaite pour faire des économies, mais qu’elle mettrait son hôpital en faillite par diminution des dépenses et donc des subventions à venir. Dépenser plus pour obtenir plus !

Les professionnels de santé libéraux sont tous dans le collimateur de l’Etat. Les pharmaciens, les kinés et les infirmières sont depuis longtemps passés sous les Fourches Caudines : ils pratiquent le tiers payant, font le travail de l’Assurance Maladie, et sauf à engager une secrétaire, renoncent à récupérer la part complémentaire aux Mutuelles. Lesquelles se frottent naturellement les mains. Les médecins sont les derniers à résister. La dernière Loi de Santé dite de « modernisation de la santé » aura raison d’eux si elle est appliquée.

TPG : une médecine à 2 vitesses

  • Le mécanisme est simple : l’Assurance Maladie qui assure 65 % des remboursements de frais de santé est en faillite à horizon 10 ans, parfois moins selon certains. L’Assurance Maladie ne pouvant faire réellement faillite, se récupère sur divers impôts pour équilibrer ses comptes. Mais à terme, la charge sera insupportable. Seule solution pour elle, se désengager en cédant une part du remboursement aux mutuelles, dont la part va progressivement augmenter à 40%, 45%, etc.
  • Or les mutuelles sont des entreprises qui doivent impérativement équilibrer leurs comptes sous peine de disparaitre. Elles n’ont pour cela que 3 moyens : augmenter les cotisations, diminuer les remboursements, et améliorer la gestion des flux. Les deux premiers moyens, s’ils sont logiques, vont pénaliser en premier chef, ceux parmi les patients qui ne pourront se payer une mutuelle suffisamment couvrante. Ou qui accepteront des prestations moindres. Concernant l’amélioration des flux, il y a des éléments positifs car les mutuelles ont tout intérêt à diminuer leur risque en essayant de diminuer la consommation de soins et d’améliorer le niveau de la Santé Publique ; c’est la raison pour laquelle elles participent à l’effort d’information et de prévention à l’égard du public pour améliorer l’efficience du système et la santé des patients. Mais il y a un aspect plus sournois qui est l’enfermement des dépenses de santé dans des sortes de « paniers de soins » ; ainsi et grâce au TPG, les mutuelles disposeront d’un outil idéal pour obliger les médecins à entrer dans des tarifications étroites.
  • La conséquence de ce dernier point est que pour maintenir leur niveau de vie et surtout pour payer des charges qui vont en croissant face à des revenus qui diminueront, les médecins prendront plus de patients à qui ils consacreront encore moins de temps (surtout à cause du surcroit de temps passé à courir après les impayés de l’assurance maladie et des mutuelles générés par le TPG). Les files d’attente vont s’allonger, le temps de la consultation, déjà si court va encore plus s’abréger. Seuls pourront bénéficier de soins de qualité, ceux qui pourront payer le médecin, lequel consacrera de plus en plus son temps à cette activité plus rémunératrice. Cela porte un nom : la médecine à 2 vitesses.

On aura abouti, par simple bêtise idéologique, au contraire de ce qui était recherché, une médecine de qualité accessible à tous. Seuls en bénéficieront les plus riches, ceux qui ne le sont pas devant se contenter d’une médecine au rabais.

L’Etat hégémonique

  • Notre monde est hostile, il est dangereux, et le besoin de protection va en augmentant. On le voit bien dans les demandes de la société qui recherche toujours plus de sécurité, plus de protection. L’Etat ne fait en cela que suivre la demande des citoyens.
  • D’où la nécessité qu’a l’Etat de devoir sans cesse augmenter son pouvoir de contrôle de la situation, ce qui aboutit à toujours plus de lois et de contraintes. Nous sommes, citoyens, tous en train de nous ligoter avec les entraves que nous créons et qui restreignent chaque jour un peu plus notre liberté. La simple explosion des caméras de surveillance augmente notre sentiment de sécurité, mais restreint notre sentiment de liberté. De même, la loi anti-terroriste est destinée à nous protéger du terrorisme, mais elle aura la possibilité de surveiller nos propos et donc de  s’insinuer dans notre intimité. L’effet secondaire majeur de cette recherche sécuritaire est la diminution de notre degré de liberté individuelle et collective.
  • La numérisation du monde et la traçabilité des actions majore l’effet de contrôle de l’Etat sur le citoyen en touchant à l’intime. Tant que nous resterons gouvernés par des partis de liberté républicaine, ces lois qui diminuent notre liberté resteront compatibles avec une relative préservation de l’intime. Mais aux mains d’intentions moins démocratiques, le risque totalitaire voire de dictature, bien que peu probable n’est pas nul. Nous avançons par contre, inéluctablement et au mieux vers un Etat crypto-communiste (au sens littéral et sans critère de jugement), où le bien commun devient supérieur au bien individuel. C’est semble t-il, combiné avec un repli identitaire, l’évolution naturelle vers laquelle tend la société française.
  • Le monde de la santé n’échappe pas à ce besoin sécuritaire avec la recherche illusoire du risque zéro. Les contraintes économiques sont actuellement au centre de nos préoccupations, et le contrôle des dépenses de santé devient obsessionnel. Les honoraires médicaux faisant partie des dépenses, il est donc nécessaire de les restreindre et de les encadrer. La logique est imperturbable. Mais la relation médecin-patient sera altérée à jamais.

J’arrive au terme de ces quelques articles sur les dangers du TPG qui ne sont, versus santé, qu’un mouvement programmé, voulu et organisé depuis des années de destruction de la médecine libérale au profit d’une santé étatisée, normée, contrôlée, et sécuritaire.

En tant que médecin, je ne m’y résout pas. En tant que citoyen je m’y oppose. Et en tant que futur patient, je le refuse.

Mais que vaut la voix d’un individu au milieu de 200.000 autres qui crient pratiquement tous la même chose aux oreilles d’un Etat devenu sourd ?

Pour revenir sur les articles précédents :

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