Comment penser la médecine de demain?
Nul ne peut prévoir ce qui adviendra dans les années qui viennent. L’avenir est toujours mieux que ce que l’on craint et moins bien que ce qu’on espère. Et il est la plupart du temps imprévisible. Prévoir est donc impossible dans ce domaine.
Penser ce n’est pas prévoir, c’est réfléchir aux solutions possibles à partir de ce que l’on connait et tenter de définir les paradigmes qui nous permettront de réfléchir à l’évolution de la médecine. C’est tout le but de ce blog : essayer en toute modestie et avec l’aide de ceux qui voudront bien y participer, de poser des définitions autour de plusieurs concepts : la relation médecin patient, le 3.0, la télémédecine, l’automédication et la prévention .
La relation médecin-patient
Cette relation est le fondement de toute médecine. Et même si l’exercice de la médecine est devenu pluriel et partagé, la valeur du colloque singulier reste une constante. Va t-elle perdurer ou bien va t-elle être vidée de son humanité au point où le patient au sein de sa communauté de patients, ne communiquera plus qu’avec une équipe de médecins structurés en communautés de médecins ?
Quoi qu’il advienne, il me semble nécessaire d’observer de près cette relation médecin-patient, et de l’avoir toujours à l’esprit quels que soient les concepts que l’on manipule. J’ai donc beaucoup privilégié l’étude de cette relation et les différents stades qui la constituent.
La pensée 3.0
Il est clair que notre monde a considérablement changé en une cinquantaine d’années. De nombreux éléments sont venus bouleverser la donne dans le domaine de la médecine. Pour n’en citer que quelques uns :
- La numérisation du vivant en particulier avec l’imagerie médicale
- Le décryptage du génome qui a ouvert les voies de la médecine prédictive
- L’avènement d’internet qui a permis une communication accélérée entre les individus et les bases de connaissance
L’homme a changé de nature puisque sa substance même est enfermée dans des microbulles de connaissance, ce que j’appelle la pixelisation de l’humain. Un exemple en ne reprenant que les 3 éléments que j’ai cités ci-dessus : on peut chez une personne atteinte de maladie d’Alzheimer, numériser son hippocampe, siège de la mémoire, le visualiser dans tous les sens, rattacher ces images à la connaissance que l’on peut avoir de son génome et de gènes de susceptibilité éventuelle s’ils existent, et grâce à la somme des cas équivalents de maladie d’Alzheimer, numérisés eux aussi de part le monde, établir une probabilité évolutive et un traitement personnalisé.
Il n’est désormais plus possible de considérer le patient seulement comme un individu victime d’une maladie. Il est devenu l’un des membres d’un corps social qui accède à un certain savoir, et qui le partage au travers du web avec d’autres individus réunis en communautés de patients. L’interaction entre ces communautés de patients se fait grâce à des machines, les ordinateurs, qui accumulent un savoir gigantesque qu’il va falloir trier, organiser et structurer pour le rendre accessible à chaque individu. L’individu, la société et les machines constituent les 3 piliers totalement solidaires d’un édifice. Il devient alors intéressant d’observer le monde au travers de ce modèle auquel j’ai donné les noms de 1.0, 2.0, et 3.0 et qui peut s’appliquer à tout concept (santé, prévention, télémédecine, communication, économie, etc.) :
- Le 1.0 c’est tout ce qui concerne l’individu isolé (ou l’individu et son entourage immédiat) : il s’observe, s’adapte, gère son existence et modifie ses comportements par sa seule connaissance.
- Le 2.0 est la somme des interactions qui existent entre l’individu et la société. La société agit sur l’individu, mais elle le modifie ; et dans le même temps l’individu modifie la société par la somme de ses comportements.
- Le 3.0 est la conséquence de l’introduction des machines intelligentes qui peuvent à la fois agir sur l’individu, agir sur la société, mais agir sur elles-mêmes en observant à la vitesse de ses microprocesseurs tout ce que la société et l’individu leur ont confié. Elles deviennent alors actrices de leur propre devenir. On se trouve alors plongé dans le monde d’Asimov.
Voici un exemple de ce paradigme 3.0 appliqué à la santé :
L’application de ce principe de réflexion aux différents champs de la médecine me semble utile pour penser la médecine de demain. C’est pourquoi tout au long de ce blog, vous verrez apparaître des notions de prévention 3.0, de médecine 3.0, de pensée 3.0…
La télémédecine
Nous avons toutes les raisons économiques et écologiques de limiter nos déplacements. De même il n’est pas possible de déplacer de par le monde des sommités médicales spécialistes de leur domaine. Et enfin, la désertification médicale nous impose d’adapter la relation médecin-patient à ces réalités.
La télémédecine est un champ extraordinaire de modernité pour la médecine, qui va en modifier considérablement l’efficience, et sans doute la façon de soigner les patients.Il me semble impossible de ne pas y réfléchir dans le cadre de la médecine de demain.
L’automédication
Il s’agissait auparavant de se soigner soi-même. De nombreuses incompréhensions ont pénalisé ce mot. Ainsi les notions d’automédication primaire, secondaire et tertiaire ont permis de clarifier les choses et de ne pas assimiler automédication à autodiagnostic. L’automédication est encore jeune, il y a 20 ans à peine, elle était proscrite. L’automédication me semble le prélude à une notion plus large auquel j’ai donné le nom de travail d’autovigilance. Peut-être y a t-il mieux à trouver…
Peut-on envisager qu’il existe également une automédication 1.0, 2.0 et 3.0. C’est à étudier …
La prévention
Elle est l’un des axes les plus avant-gardistes de la médecine. En effet, si on peut faire de la médecine prédictive personnalisée, on diminuera considérablement notre risque de tomber malade. Mais cela posera bien évidemment d’autres problèmes, notamment en termes éthiques.
La prévention, elle aussi est intéressante à étudier au travers de la pensée 3.0.
Ethique
Je terminerai par ce mot « éthique » qui ne fait pas l’objet d’un chapitre spécifique de ce blog, mais qui est une constante : quel que soit le concept étudié, il me semble que le passage du 2.0 au 3.0 ne peut se faire sans une réflexion éthique approfondie. Pour paraphraser la phase célèbre de Malraux : la médecine qui vient sera éthique, ou ne sera pas. C’est du moins mon opinion.
A nous tous d’en débattre.
Dr Loïc Etienne
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Je vous en prie